Plongée : le Sardine run, un spectacle grandiose

Par Sandrine Bavard

 

C’est un phénomène naturel et un spectacle à nul autre pareil qu’offre la migration des sardines entre juin et juillet le long des côtes africaines. Un must pour tous les amateurs de plongée.

Elles sont des millions chaque année, entre mai et juillet, à braver les pièges de l’Océan Indien pour se reproduire : les sardines. Elles se rassemblent dans les eaux du Banc des Aiguilles au large du Cap occidental pour migrer jusqu’au large de Durban, dans la province du Kwazulu-Natal bien plus au nord.
Un déplacement que l’on peut voir à l’œil nu, puisque les bancs de poissons peuvent faire plus de 7 km de long, 1.5 km de large et 30 mètres de profondeur.

Evidemment, ce remue-ménage ne passe pas inaperçu auprès des grands prédateurs attirés par ce festin facile. Ils sont tous là pour ce grand rendez-vous : dauphins, requins, baleines, otaries, thons, bonites, marlins, espadons…
Sous l’eau, les sardines s’organisent face à la menace. Elles serrent les rangs et forment une sphère compacte, d’un diamètre de 10 ou 20 mètres parfois, où les plus jeunes sont réfugiés au centre.

Les prédateurs multiplient les offensives pour les désorganiser : ils les pourchassent à grande vitesse, puis les poussent à la surface. Les sardines, qui n’ont plus d’issue de secours, s’éparpillent et se jettent ainsi dans la gueule du… loup !
Et ce qu’elles ne savent pas encore, c’est qu’à la surface, les attendent d’autres prédateurs : les oiseaux-pêcheurs, goélands en tête, qui tournoient dans le ciel avant de piquer la tête dans l’eau pour saisir leur proie.

Pour les pêcheurs, professionnels comme amateurs, c’est évidemment une aubaine. A Durban par exemple, le front de mer, habituellement fréquenté par les plagistes, devient un port improvisé avec des milliers de sardines ramenées dans les filets, lâchés un peu plus au large par des pêcheurs sur des bateaux pneumatiques.
Ce spectacle impressionnant attire aussi tous les amateurs de plongée et de snorkeling du monde, puisque c’est une occasion unique de croiser des grands prédateurs : une grande variété de requins, des dauphins et si vous avez de la chance, peut-être une (des) baleine (s) !

Reste à savoir pourquoi les sardines entreprennent cette migration presque « suicidaire »…
« Leur instinct de reproduction prime sur leur instinct de survie et les pousse à surmonter tous les défis pour retourner pondre dans la région qui les a vues naître. La logique est implacable : si cette stratégie, appelée Homing, a fonctionné pour elles, elle réussira aussi à leur descendance. Au final, le bilan de population leur donne raison : le grand succès reproductif l’emporte sur la forte mortalité lors de la migration« , rapporte Gaëlle Courcoux dans un article de l’Insitut de Recherche pour le développement.

En revanche, le point d’arrivée de cette migration, vers Durban, dans un milieu hostile pour les sardines, soulève encore des questions chez les scientifiques. « S’agit-il d’un comportement « relique » hérité du dernier âge de glace, à l’époque où les sardines vivaient plus au Nord ? […]. Ou bien, autre hypothèse, un banc se serait-il égaré de sa route ordinaire de migration saisonnière ? Sa descendance se multipliant d’année en année, il constituerait à présent le Sardine run« , questionne l’Institut de Recherche pour le développement.